N°5 | Pédagogie de la règle ou Didactique du truc ?

"Les articles de ce numéro ont fait l'objet d'une évaluation en double aveugle."

Ce numéro s’intéresse à la règle en didactique du français. La règle, terme polysémique dans le champ de l’enseignement du français, est source de malentendus qui trouvent leur origine dans différents amalgames qui sont des obstacles au débat et à la réflexion. Parler de la règle en didactique du français, c’est rapidement la réduire au champ de l’étude de la langue avec, très souvent mais pas exclusivement, des finalités orthographiques ou morphosyntaxiques. Le triptyque règles – exercices – application caractérise un modèle pédagogique dominant qualifié de traditionnel (Élalouf & al., 2011 : 42). La conception sous-jacente de l’apprentissage est qu’il suffirait de « connaitre » les règles (et leurs kyrielles d’exceptions) pour maitriser la langue et cela déboucherait naturellement sur la maitrise des compétences langagières… Cette approche place donc la règle comme la clé de voute de l’enseignement de la langue avec une démarche applicationniste et déductive construite sur des connaissances déclaratives, approche critiquée par Ferdinand Brunot (1908) et Louis Legrand (1966) pour ne citer que ces auteurs et illustrer l’aspect historique et ancien de cette problématique. La question du rôle et de l’utilité de la règle n’est donc pas nouvelle.

Il pourrait être légitime de penser que la règle est un produit de l’activité conjointe maitre/élèves dans la classe. Mais est-ce réellement cela ? Il existe une pédagogie descendante qui assure la reproduction de règles d’une génération d’enseignants à une autre. Quelle est alors la part de l’élève dans la formulation des règles ? Il existe aussi, en parallèle, une transmission de « trucs », bricolages pédagogiques fabriqués localement : « le petit cœur de la phrase » pour parler du verbe par exemple… Il s’agit donc ici de s’intéresser aux règles, et éventuellement aux « trucs », dans toutes leurs dimensions pédagogiques, leurs validités, leurs histoires, leurs formes… Il s’agit aussi de poser la question des besoins métalinguistiques des élèves et par extension la question de la production du métalinguistique en classe et de son statut. Gombert (1990) définit le métalinguistique comme une activité de réflexion sur le langage, impliquant la conscience que le sujet a de ses connaissances sur le langage. « Les savoirs métalinguistiques des élèves sont une composante [des] savoirs opératoires [des élèves]. Le maitre s'appuie sur eux pour la résolution des problèmes en situation de production ou de réception. II y a également recours dans des résolutions différées de la production ou de la réception, mais qui tirent d'elles leur sens et leur finalité. II s'appuie, enfin, sur eux dans des résolutions de problèmes décrochées de l'activité de production ou de réception, et qui visent avant tout la compréhension, la connaissance de faits, de fonctionnements linguistiques. » (Ducancel, 1994).

Quelle est alors la place des règles ? Sachant que poser cette question c’est également interroger la norme et son statut car une règle présente une norme à appliquer…

Des études menées en France et au Québec ont montré que la transition primaire-secondaire (environ 12 ans) peut constituer un moment de vulnérabilité pour plusieurs élèves relativement à leurs apprentissages grammaticaux (Boyer, 2012; Brissaud, Cogis et Totereau, 2014). Un de leur nœud de difficulté réside notamment dans la gestion orthographique des verbes lorsque ceux-ci sont conjugués à des temps composés (Boyer, 2012; Brissaud et Sandon, 1999). Afin d’élaborer des dispositifs didactiques susceptibles d’aider les élèves en ce sens, certains chercheurs recommandent de prendre en compte leurs représentations grammaticales (Cogis, 2005; Nadeau & Fisher, 2006). Suivant cette idée, et face au manque de données scientifiques au Québec, nous avons conduit une étude multicas visant à décrire les représentations grammaticales sur les temps composés d’élèves de première secondaire. Cet article se propose donc de présenter une partie des résultats obtenus dans le cadre de l’étude, en mettant l’accent sur une meilleure compréhension de l’utilisation de certaines stratégies de substitution. L’article se conclut en faisant mention de quelques pistes d’intervention didactiques.

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Boisvert M. & Boyer P. (2019). "L’utilisation de stratégies de substitution pour orthographier l’auxiliaire et le participe passé". Scolagram n° 5 Pédagogie de la règle ou Didactique du truc ?. En ligne : https://scolagram.u-cergy.fr/index.php/content_page/item/306-l-utilisation-de-strategies-de-substitution-pour-orthographier-l-auxiliaire-et-le-participe-passe

La tradition scolaire propre à chaque langue-culture propose aux générations successives d’enseignés et enseignants des formulettes et des comptines ,par leurs vertus ludiques et mnémotechniques, celles-ci servent à « faire passer » les règles dont les énoncés véritables paraissent autrement austères et rebutants. Le recours à ces astuces pédagogiques fait souvent l’objet de critiques sévères. À l’heure où la dimension épistémologique des discours didactiques est légitimement mise au centre des préoccupations, on a tendance à les bannir, souvent pour se démarquer des pratiques de classe antérieures. La formulette « le masculin l’emporte sur le féminin » est un exemple emblématique à cet égard. Refoulée de la plupart des manuels actuels, pratiquement absente des grammaires universitaires, mais fortement ancrée dans les pratiques de classe, elle a suscité une vague de protestations au moment où, à la faveur d’évènements largement médiatisés, le débat sur le rôle de la langue dans les rapports entre les sexes est revenu à l’ordre du jour. En dehors de toute polémique, nous montrons quelles sont les raisons véritables du succès dont bénéficient de telles formules et en quoi un usage adéquat — et non pas un refoulement — permettrait d’accompagner les représentations spontanées des élèves pour aider ceux-ci à entrer dans l’abstraction propre à la langue de l’école.

Contribution élaborée en lien avec un projet ayant bénéficié du soutien de Wallonie-Bruxelles international

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Kalinowska Irène-Marie (2019). " Quand une formulette scolaire en chasse une autre ou du bon usage du discours grammatical. « Le masculin l’emporte sur le féminin » ou « le féminin l’emporte sur le masculin » ?" Scolagram n°5. En ligne : https://scolagram.u-cergy.fr/index.php/content_page/item/281-formulette


Le présent article veut décrire la conscience translinguistique d’élèves québécois de 4e secondaire (15-16 ans). Pour ce faire, nous avons administré à 78 participants un questionnaire dans lequel nous leur avons demandé de rendre compte des similitudes et des différences qu’entretiennent les grammaires du français et de l’anglais. Les résultats montrent que, pour plusieurs élèves, il existe des ressemblances entre ces grammaires, ressemblances qui sont principalement liées à la syntaxe et à la ponctuation, au lexique et aux catégories de mots. Les données portant sur les similitudes révèlent en outre qu’un peu moins d’un quart de l’échantillon n’en voit aucune. Quant aux différences, perçues par presque tous les élèves de l’échantillon, elles sont surtout associées à l’orthographe grammaticale et au genre nominal, à la langue en général ainsi qu’à la syntaxe et à la ponctuation. En fin d’article, nous discutons nos résultats en fonction de la recherche sur la conscience translinguistique et la didactique intégrée des langues.

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Thibeault J. & Gauvin I. (2019). "Quelles sont les similitudes et les différences entre les grammaires du français et de l’anglais ?". Scolagram n°5 Pédagogie de la règle ou Didactique du truc ? En ligne : https://scolagram.u-cergy.fr/index.php/content_page/item/305-quelles-sont-les-similitudes-et-les-differences-entre-les-grammaires-du-francais-et-de-l-anglais?

L’objectif de cette étude est de décrire les stratégies employées par des élèves québécois de 9 à 12 ans pour gérer l’orthographe d’homophones grammaticaux dans le cadre d’une situation d'écriture libre. L’analyse d’entretiens métagraphiques menés auprès de 119 élèves révèle l’utilisation de stratégies enseignées en classe et éclaire certaines erreurs fréquentes de même que des conceptions erronées chez les élèves. Les résultats indiquent également des différences significatives de l’utilisation des stratégies selon le milieu socio-économique, le sexe et le niveau scolaire.

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Giguère M.-H. & Aldama R. (2019). « Résoudre des problèmes liés à l’orthographe des homophones grammaticaux ». In Scolagram n°5, Pédagogie de la règle ou Didactique du truc ?. En ligne : https://scolagram.u-cergy.fr/index.php/content_page/item/280-resoudre-des-problemes-lies-a-l-orthographe-des-homophones-grammaticaux

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