La tradition scolaire propre à chaque langue-culture propose aux générations successives d’enseignés et enseignants des formulettes et des comptines ,par leurs vertus ludiques et mnémotechniques, celles-ci servent à « faire passer » les règles dont les énoncés véritables paraissent autrement austères et rebutants. Le recours à ces astuces pédagogiques fait souvent l’objet de critiques sévères. À l’heure où la dimension épistémologique des discours didactiques est légitimement mise au centre des préoccupations, on a tendance à les bannir, souvent pour se démarquer des pratiques de classe antérieures. La formulette « le masculin l’emporte sur le féminin » est un exemple emblématique à cet égard. Refoulée de la plupart des manuels actuels, pratiquement absente des grammaires universitaires, mais fortement ancrée dans les pratiques de classe, elle a suscité une vague de protestations au moment où, à la faveur d’évènements largement médiatisés, le débat sur le rôle de la langue dans les rapports entre les sexes est revenu à l’ordre du jour. En dehors de toute polémique, nous montrons quelles sont les raisons véritables du succès dont bénéficient de telles formules et en quoi un usage adéquat — et non pas un refoulement — permettrait d’accompagner les représentations spontanées des élèves pour aider ceux-ci à entrer dans l’abstraction propre à la langue de l’école.
Contribution élaborée en lien avec un projet ayant bénéficié du soutien de Wallonie-Bruxelles international